En 6 ans, les normes Euro 6 auront significativement évoluées avec une attention particulière sur les essais en conditions de conduite réelles. Les constructeurs ont dû s'adapter en conséquence dans un laps de temps particulièrement court. Un bilan s’impose sur l’ensemble des procédures à appliquer pour homologuer un véhicule en matière d’émissions polluantes.
Récapitulatif des essais
Afin de pouvoir être homologué du point de vue de ses émissions polluantes, un véhicule doit satisfaire à toute une série d'essais :
- Emissions de gaz polluants en laboratoire (cycle WLTP) et en conditions de conduite réelles (RDE)
- Emissions de particules en laboratoire (cycle WLTP) et en conditions de conduite réelles (RDE)
- Emissions au ralenti
- Emissions de gaz du carter moteur
- Emissions par évaporation
- Durabilité des systèmes de dépollution
- Emissions à basse température
- Alerte en cas de dysfonctionnement des systèmes de dépollution (OBD)
- Consommation d’énergie en laboratoire (cycle WLTP)
- Opacité des fumées
- Mesure de la puissance du ou des moteurs
- Essais de conformité en service
- Indicateur de la consommation d’énergie (FCM)

Selon la source d’énergie du véhicule (moteur thermique ou moteur électrique ; essence, diesel, …), une procédure différente s’applique. Dans le cas des véhicules acceptant plusieurs sources d’énergie (comme les véhicules fonctionnant au GPL ou les véhicules à carburant modulable), il faut parfois doubler les essais afin de les réaliser avec chacun des carburants compatibles.
Depuis 2014, les normes Euro 6 ont été maintes fois revisitées, notamment en ce qui concerne les points suivants :
- le cycle d’homologation
- la mise en œuvre des essais en conditions de conduite réelles
- la limite en matière d’émissions du nombre de particules
- la mesure des émissions par évaporation
- les essais de conformité en service
- les normes OBD
- l’affichage de la consommation de carburant

A ce titre, les normes Euro 6 englobent plusieurs révisions :
- Euro 6b
- Euro 6c
- Euro 6d-TEMP (incluant, notamment Euro 6d-TEMP-EVAP-ISC)
- Euro 6d

Polluants gazeux et consommation d’énergie
Les essais d’émissions consistent à mesurer sur banc à rouleaux (en laboratoire) les émissions de gaz polluants suivants :
- CO - monoxyde de carbone
- THC - hydrocarbure (total)
- NMHC - hydrocarbure (non-méthanique)
- NOx - oxydes d’azote
- PM - masse particulaire
- PN - nombre de particules

Pour les normes Euro 6b, le cycle de référence est le cycle NEDC. Les évolutions suivantes se basent sur le cycle WLTP. Toutefois, les données de consommation de carburant et d’émissions de CO2 ne sont pas exprimées selon les valeurs mesurées lors du cycle WLTP. Les mesures sont effectivement « converties » en valeurs NEDC corrélé. Cette mesure a été initialement mise en place afin de ne pas défavoriser les véhicules nouvellement homologués. En effet, les émissions de CO2 mesurées en WLTP sont significativement plus élevées que celles mesurées en NEDC.

Au cours du cycle d’homologation (NEDC ou WLTP le cas échéant), les émissions de CO2 (ainsi que, par analogie, la consommation de carburant) sont évaluées, tout comme la consommation d’énergie électrique des véhicules hybrides rechargeables et des véhicules purement électriques.

Pour les véhicules hybrides rechargeables, l'Union Européenne tient compte de l’autonomie du véhicule en mode purement électrique afin de définir le taux d'utilisation du moteur électrique. Les valeurs des émissions de gaz polluants, des émissions de CO2 et de la consommation de carburant sont pondérés en fonction de ce facteur.

Essais en conditions de conduite réelles RDE
Les essais en conditions de conduite réelles ont été progressivement intégrés dans les procédures d’homologation Euro 6, une intégration qui s’est faite en 4 temps au niveau de l’Union Européenne :
- Premier acte en mars 2016 où il est indiqué que les essais RDE doivent être réalisés pour observation mais ils n’entrent pas en ligne de compte dans le processus d’homologation.
- Deuxième acte en avril 2016 où les essais RDE sont rendus obligatoires afin d’obtenir l’homologation Euro 6d temp (obligatoire à partir du 1er septembre 2017 pour les nouveaux types de véhicules et à partir du 1er septembre 2019 pour tous les véhicules neufs). Seule la mesure des oxydes d’azote est prise en compte dans le processus d’homologation avec un facteur de conformité prévu de 2,1 pour les normes Euro 6d-TEMP et de 1,5 pour les normes Euro 6d.
- Troisième acte en juin 2017 où les essais RDE doivent inclure la mesure du nombre de particules dans le processus d’homologation (à partir de septembre 2017 pour les nouveaux types de véhicules et à partir de septembre 2018 pour tous les véhicules neufs). Les conditions d’essais sont revues afin de prendre en compte, notamment, des trajets courts en ville et un démarrage à froid.
- Quatrième acte en novembre 2018 où il est déterminé que les essais RDE doivent aussi être effectués dans le cadre des vérifications de la conformité en service. Le facteur de conformité pour les normes Euro 6d est revu à la baisse avec une valeur de 1,43 (au lieu de 1,5), prenant en considérant l’amélioration de la précision de mesures des systèmes de mesure portables PEMS

Emissions au ralenti
La mesure des émissions au ralenti ne concerne que les moteurs à essence. Elle ne s’applique, par ailleurs, qu’aux émissions de monoxyde de carbone (CO). Au ralenti, la teneur en CO ne doit pas dépasser 0,3 %, une fois le moteur à température.
Emissions du carter
Le contrôle des émissions de gaz de carter est effectué uniquement pour les véhicules à moteur à allumage commandé. La mise en place de ce test consiste à vérifier que la pression dans le carter moteur ne dépasse jamais la pression atmosphérique, afin de démontrer que l’aspiration du reniflard (autrement appelé déshuileur) est efficace. En effet, une surpression pourrait causer un endommagement des composants moteurs (en particulier les joints) et entraîner, à terme, des fuites de gaz néfastes pour l’environnement (et néfastes pour la fiabilité du moteur, par ailleurs).

Pour mesurer l’efficacité du système d’aspiration, le véhicule est mis sur banc à rouleaux et soumis à 3 différents cas de conduite :
- Moteur au ralenti
- Véhicule roulant à 50 km/h
- Véhicule chargé à 50 km/h
Emissions par évaporation
Les essais d’émissions par évaporation visent à évaluer les émissions d’hydrocarbures du système d’alimentation en carburant et s’applique uniquement aux moteurs essence.
Le test d'émissions par évaporation évalue les émissions d’hydrocarbures lors des situations suivantes :
- véhicule en stationnement (variation de température due à l’ensoleillement)
- perméabilité du système à long terme
- après une phase de conduite

Les essais d’émissions par évaporation font l’objet d’une description détaillée dans l’article concernant les dernières évolutions des normes Euro 6.
Durabilité
L’essai de durabilité vise à évaluer la dégradation des systèmes de dépollution lorsque le véhicule a effectué un kilométrage élevé. Cet essai peut être conduit de 2 façons différentes :
- sur un véhicule complet (160.000 km à effectuer sur route, sur piste ou sur banc à rouleaux)
- sur banc moteur (dans ce cas, un essai WLTP sur véhicule complet doit être effectué préalablement au vieillissement et un autre essai après le vieillissement)
Au terme de cet essai, les émissions de polluants sont mesurées selon le cycle WLTP. Les valeurs mesurées ne doivent pas dépasser les normes auxquelles le véhicule satisfait.

Emissions à basse température
Les essais d’émissions à basse température ne concernent que les moteurs à essence. Cet essai consiste à réaliser la partie du cycle urbain du cycle NEDC (d’une durée de 780 secondes) et à mesurer les émissions de monoxyde de carbone ainsi que les émissions d’hydrocarbures.
Durant ce test, les émissions de CO ne doivent pas dépasser 15 g/km et les émissions d’HC doivent être inférieures à 1,8 g/km.
Si les moteurs diesel ne sont pas concernés par ces tests, les constructeurs doivent néanmoins démontrés que les dispositifs de traitement des NOx deviennent opérationnels au plus tard 400 secondes après un départ à froid par une température ambiante de – 7 °C.

Conformité en service
Le test de conformité en service consiste à vérifier que les émissions des véhicules homologués restent toujours conformes aux normes d’émissions Euro 6 au cours de sa vie. Cette vérification est effectuée sur des véhicules de moins de 5 ans ou ayant parcouru moins de 100.000 km.
En fonction du nombre de véhicules vendus l’année précédente, jusqu’à 30 véhicules (voire plus dans certains cas) d’une même famille doivent être évalués au minimum tous les 2 ans. Ces véhicules sont évalués sur le cycle WLTC et/ou en conditions de conduite réelles.

Les essais de conformité en service font l’objet d’une description détaillée dans l’article concernant les dernières évolutions des normes Euro 6.
Opacité des fumées
Les essais d’opacité des fumées ne concernent que les moteurs diesel. Il s’agit de mesurer l’opacité de fumées d’un moteur diesel en régime stabilisé et lors de phases d’accélération. L’opacité des fumées est mesurée à l’aide d’un opacimètre.
La mise en œuvre de cet essai est semblable à la procédure effectuée lors du contrôle technique (en France et en Belgique notamment).
Mesure de la puissance
Pour un moteur thermique, les caractéristiques de puissance et de couple sont évaluées sur banc moteur, en incluant les organes indispensables à son fonctionnement et si possible, sans la boîte de vitesses. Le moteur balaye ensuite l’ensemble des régimes possibles (du régime de ralenti au régime maximal) avec une attention particulière aux régimes de couple maximum et de puissance maximum.

Pour les moteurs électriques, la mesure de puissance est scindée en deux étapes. La première étape consiste à mesurer la puissance du moteur de 0 au régime de rotation maximal. Puis, dans une deuxième étape, la puissance moteur est évaluée sur une durée de 30 minutes dans une plage de régime qui correspond aux régimes où le moteur délivre 90 % de la puissance maximale mesurée lors du premier essai.
Il est important de noter que cette mesure ne tient pas compte d’une éventuelle limitation de puissance due à l’échauffement des batteries : la puissance maximale sur 30 minutes ne dépend que des caractéristiques du moteur et non de l’ensemble moteur + batteries.
Diagnostic embarqué OBD
Tout véhicule doit être équipé d’un système de diagnostic embarqué, plus connu sous le nom d’OBD (On-Board Diagnostic). Ce système doit être capable d’identifier différents types de détériorations ou de dysfonctionnement, notamment en ce qui concerne les systèmes d’échappement.
L’OBD est une technologie normalisée, c’est-à-dire qu’elle ne peut pas être spécifique à un constructeur et les informations fournies par l’OBD doivent répondre à un standard commun dans l’industrie automobile.

Afin de tester le bon fonctionnement de l’OBD, un véhicule (après avoir effectué les essais de durabilité) est soumis à plusieurs cas de dysfonctionnement puis le véhicule est essayé sur banc à rouleaux selon le cycle WLTP.
Les différents défauts étudiés sont les suivants :
- Remplacement du catalyseur par un catalyseur détérioré ou défectueux
- Remplacement du filtre à particules par un filtre détérioré ou défectueux
- Déclenchement de ratés d’allumage moteur
- Remplacement d’une sonde lambda par une sonde détérioré ou défectueuse
- Déconnexion du système de purge de carburant (lié aux pertes par évaporation pour les moteurs essence)
- Déconnexion de tout autre système de dépollution
Avant la fin du cycle, le voyant d’alerte doit se déclencher au niveau du tableau de bord pour valider le test. Plus généralement, le constructeur doit démontrer que le voyant d'alerte sera allumé lorsque les émissions de monoxyde de carbone, d'hydrocarbures, d'oxydes d'azote ou de particules sont supérieurs aux seuils de détection en vigueur.

Bilan des normes Euro 6
Grâce, en particulier, aux essais en conditions de conduite réelles, les dernières évolutions des normes Euro 6 seront indéniablement bénéfiques dans le cadre de la maîtrise des émissions de gaz polluants (bien qu'il reste encore certainement des failles), comme semblent le montrer les premiers essais réalisés par des organismes indépendants (tels l'ADAC, par exemple).
Le scandale Volkswagen avec les moteurs diesel aura certainement été bénéfique de ce point de vue. En effet, si l'ensemble des mesures applicables aux normes Euro 6d étaient en discussion depuis de nombreuses années, il était loin d'être évident qu'elles deviennent obligatoires encore en 2016 : ce n'est pas un hasard s'il les modalités des essais en conditions de conduite réelles ont évolué 4 fois en moins de 3 ans .
D'autre part, les consommations exprimées selon le cycle WLTP pourraient rétablir, dans une certaine mesure, la confiance du grand public dans les estimations de consommations que les constructeurs communiquent dans leurs brochures informatives et autres campagnes publicitaires (estimations imposées par l'Union Européenne).

Toutefois, les nombreuses évolutions apportées aux normes Euro 6, dans un court laps de temps, ne sont pas sans générer une certaine confusion auprès du grand public, mais pas que... On peut citer l’exemple de la vignette Crit’Air en France qui ne prend en compte que la norme Euro 6 dans sa globalité.
Néanmoins, un moteur homologué Euro 6b n’a, finalement, plus grand-chose à voir avec un moteur de dernière génération conformes aux normes Euro 6d-TEMP-EVAP-ISC, tant du point de vue mécanique que sur le plan de ses systèmes de dépollution.
Future réglementation
Les normes Euro 7 devraient s'inscrire dans la continuité des normes Euro 6d. Elles devraient surtout marquer une évolution significative sur les points suivants :
- une harmonisation entre les moteur essence et diesel en matière d’émissions de gaz polluants
- une baisse des niveaux d’émissions tolérés en matière d’émissions de gaz polluants avec une attention particulière sur les émissions d’oxydes d’azote
- une prise en compte des particules plus petites (à partir de 10 nm au lieu de 23 nm) dans le calcul du nombre de particules
- un spectre de conditions de conduites (profil de conduite, profil de la route, température, altitude, ...) plus large pour les essais en conditions de conduite réelles

Les précédents articles
- Normes Euro 6: un défi (aussi) pour les moteurs à essence (décembre 2013)
- Normes Euro 6: pas assez efficaces pour réduire les NOx (octobre 2014)
- Nouvelles normes Euro 6: les effets sur les émissions de NOx sont incertains (janvier 2017)
- Nouvelles normes d’émissions: Euro 6d temp (septembre 2017)
- Normes Euro 6c: filtre à particules et casse-tête hybride (mai 2018)
- Normes Euro 6: comment s’y retrouver ? (octobre 2018)
- Normes Euro 6 : en constante évolution (octobre 2019)
Lexique
ADAC : Allgemeiner Deutscher Automobil-Club, association automobile allemande
CO2 : dioxide de carbone, gaz à effet de serre
NEDC : New European Driving Cycle, ancien cycle d'homologation
NOx : Dioxydes d'azote, gaz nocifs pour le système respiratoire et responsables de la formation de brume de polluants atmosphériques (smog)
OBD : On-Board Diagnostics, outils de diagnostic embarqué permettant l'affichage d'une alerte au tableau de bord en cas de dysfonctionnement
PEMS : Portable Emissions Measurement System, système de mesure des émissions à l'échappement portable utilisé lors des essais en conditions de conduite réelles
RDE : Real Driving Emissions, mesure des émissions de gaz polluants en conditions de conduit réelles, sur route ouverte
WLTC : Worldwide harmonized Light vehicles Test Cycle, cycle d'homologation est notamment destinée à évaluer la consommation de carburant et les émissions de gaz polluant et/ou à effet de serre d'un véhicule
WLTP : Worldwide harmonized Light vehicles Test Procedure, ensemble de cycles de validation requis pour homologuer un véhicule.
Crédits photos : Porsche, Volkswagen, Audi, Continental, Citroën, Volvo, Mercedes, Wikimedia commons, Renault
Tableaux et graphiques : Guillaume Darding
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06 octobre 2020 à 10h15
Bonjour,Pouvez vous m'aider a hiérarchiser les ordres de grandeur d'emissions de fumées entre un Euro 6 essence et diesel dans des conditions d'usage de montage ?
En effet, habitant dans la vallée de Chamonix très polluée par les fumées, j'aimerai faire ma part.
Mais j'ai des doutes de l'impact réel de choisir une Sandero essence 90 cv versus diesel 90cv, car comme elle a 30% de moins de couple j'ai peur d'avoir a monter dans les tours et donc a la fin ne pas faire le progres qu'indique l'écart de gains que les tests d'homologation font sur le plat.
Et puis, je me dis que le gain de budget que je ferai avec le diesel je pourrait le mettre dans un chauffage moins poluant qui est aussi une source de fumées importante.
Merci de votre aide